QUELLES SONT LES CAUSES PRINCIPALES DU BRUXISME ?

Traitement du bruxisme à Genève

Le bruxisme, phénomène complexe et multifactoriel, se manifeste par des contractions involontaires et répétées des muscles masticateurs. Ces épisodes surviennent le plus souvent de manière inconsciente, de jour comme de nuit. Si le bruxisme nocturne est le plus fréquemment observé, sa forme diurne n’est pas rare et peut s’avérer tout aussi délétère. Comprendre les causes sous-jacentes de cette pathologie est essentiel non seulement pour poser un diagnostic précis, mais également pour mettre en œuvre une prise en charge thérapeutique adaptée, qu’elle soit d’ordre médical (par injection de toxine botulique), dentaire ou psycho-comportemental.

Sommaire

Bruxisme : origine multifactorielle

Le bruxisme, ou grincement involontaire des dents, ne peut pas être attribué à une cause unique. Il s’agit d’un trouble multifactoriel dans lequel interviennent plusieurs dimensions : des facteurs neurologiques, psychologiques (stress, anxiété, troubles du sommeil), pharmacologiques (certains traitements médicamenteux) ainsi que des éléments occlusaux liés à la position et à l’alignement des dents. Cette combinaison complexe rend le bruxisme particulièrement difficile à appréhender et explique pourquoi il ne peut être traité efficacement par une solution isolée.
Sa prise en charge repose sur une approche globale et pluridisciplinaire, associant dentistes, médecins, orthodontistes et parfois spécialistes du sommeil. Une telle stratégie permet non seulement de protéger les dents et l’articulation temporo-mandibulaire, mais aussi d’agir sur les causes profondes du trouble, qu’elles soient musculaires, fonctionnelles ou psychologiques. Cette vision intégrée est la clé pour réduire durablement les symptômes, améliorer la qualité de vie et limiter les complications esthétiques ou fonctionnelles du bruxisme.

Le stress et l’anxiété peuvent-ils provoquer le bruxisme ?

L’une des causes majeures, largement documentée dans la littérature médicale, est le stress chronique. Le bruxisme est souvent une réponse neuro-musculaire inconsciente à une tension psychique accumulée. Le sujet bruxomane « décharge » cette tension au niveau des muscles masticateurs, par un serrement ou un grincement des dents.
L’anxiété généralisée, les troubles de l’humeur, et les épisodes dépressifs légers à modérés peuvent également être impliqués. Il ne s’agit pas ici de pathologies psychiatriques graves, mais plutôt d’un mal-être diffus, pernicieux, qui s’exprime somatiquement à travers le système stomatognathique.
De nombreuses études en neuropsychologie ont mis en évidence une corrélation significative entre le niveau de stress perçu et l’intensité du bruxisme nocturne, notamment chez les individus présentant une faible tolérance au stress ou des mécanismes d’adaptation insuffisants.

Sommeil et micro-éveils et bruxisme

Le bruxisme pendant le sommeil est étroitement lié à des anomalies du cycle veille-sommeil. Contrairement à une idée reçue, il ne s’agit pas d’un trouble du sommeil à proprement parler, mais plutôt d’une activité parafonctionnelle qui survient en dehors des phases de sommeil profond, le plus souvent lors de micro-éveils transitoires.
Ces épisodes, qui peuvent survenir jusqu’à une vingtaine de fois par nuit sans que le patient en ait conscience, provoquent une activation brève du système nerveux autonome. Cette hyperactivité neuromusculaire se traduit par un resserrement brusque des mâchoires, parfois accompagné de grincements audibles. Les personnes souffrant d’apnée du sommeil, de ronflements ou de troubles respiratoires nocturnes sont ainsi plus exposées au bruxisme.

Médicaments et substances psychoactives et bruxisme

Certains médicaments peuvent favoriser l’apparition ou l’aggravation du bruxisme. Les principaux incriminés sont les psychotropes, notamment les antidépresseurs de la famille des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), tels que la fluoxétine ou la paroxétine. Ces substances peuvent perturber la régulation des neurotransmetteurs au niveau des noyaux gris centraux, induisant une hyperactivité musculaire involontaire.
Les amphétamines, la caféine à fortes doses, le tabac et l’alcool sont également des facteurs aggravants bien documentés. Ces substances stimulent le système nerveux central, modifient l’architecture du sommeil, et peuvent déclencher ou renforcer le réflexe bruxomane.
Il convient donc de porter une attention particulière à l’histoire pharmacologique du patient dans le cadre du diagnostic différentiel, d’autant plus que la réduction ou l’adaptation d’un traitement médicamenteux peut suffire, dans certains cas, à faire disparaître le trouble.

Facteurs neurologiques et bruxisme

Certaines affections neurologiques peuvent être à l’origine d’un bruxisme secondaire. C’est le cas notamment de la maladie de Parkinson, des lésions cérébrales traumatiques, ou encore de certaines formes de paralysie cérébrale. Dans ces situations, le bruxisme résulte d’un dysfonctionnement du contrôle moteur central.
Chez les enfants présentant des troubles du spectre autistique ou une hyperactivité avec déficit de l’attention (TDAH), une prévalence élevée du bruxisme a également été observée. Les mécanismes neurologiques en jeu ne sont pas encore totalement élucidés, mais semblent impliquer des déséquilibres neurochimiques au niveau du tronc cérébral.

Déséquilibres occlusaux et bruxisme

Longtemps considérée comme l’une des causes principales du bruxisme, la théorie occlusale — selon laquelle un mauvais alignement des dents ou une malocclusion favoriserait le bruxisme — est aujourd’hui remise en question par la majorité des experts.
Si des interférences occlusales peuvent dans certains cas accentuer le phénomène, elles ne sont généralement pas à l’origine du trouble. Des études longitudinales ont démontré que les corrections orthodontiques n’entraînent pas nécessairement une diminution du bruxisme, et que celui-ci peut apparaître chez des patients à l’occlusion parfaite.
Toutefois, en présence d’un bruxisme sévère, l’évaluation occlusale reste pertinente afin d’exclure des facteurs mécaniques aggravants ou d’évaluer l’impact fonctionnel sur l’articulation temporo-mandibulaire.

Composante génétique et terrain familial dans le bruxisme

Des études épidémiologiques récentes ont mis en évidence une certaine prédisposition génétique au bruxisme. Il a été observé que les patients présentant un parent au premier degré atteint ont un risque plus élevé de développer eux-mêmes un bruxisme, en particulier dans sa forme nocturne.
La recherche génétique suggère une implication possible de polymorphismes dans les gènes régulant la dopamine ou la sérotonine, deux neurotransmetteurs impliqués dans le contrôle moteur et les états émotionnels. Si ces données demandent encore à être confirmées, elles ouvrent la voie à une compréhension plus fine et personnalisée de la pathogénie du bruxisme.

Bruxisme chez l’enfant 

Chez l’enfant, le bruxisme est fréquent, souvent transitoire, et généralement bénin. Il est souvent observé entre l’âge de 4 et 10 ans, en lien avec la croissance des arcades dentaires, les phases de renouvellement dentaire, ou des épisodes infectieux ORL récurrents.
Le stress scolaire, les troubles anxieux précoces, et les modifications du sommeil (notamment les terreurs nocturnes) peuvent également constituer des déclencheurs. Dans la grande majorité des cas, ce bruxisme juvénile disparaît spontanément à l’adolescence, sans intervention particulière.

Causes comportementales et bruxisme

Le bruxisme diurne, souvent sous-estimé, est fréquemment associé à des comportements répétitifs ou des postures mandibulaires inadaptées. Contrairement au bruxisme du sommeil, celui-ci peut être observé en pleine conscience : les patients serrent les dents ou contractent les muscles masticateurs lors d’activités exigeant concentration ou effort intellectuel — rédaction, conduite, travail sur écran, etc.
Ces gestes sont rarement perçus comme problématiques par les patients eux-mêmes, mais leur répétition induit une hyperactivité musculaire chronique. Ce comportement réflexe s’installe progressivement et devient automatique. Il est souvent renforcé par un environnement de travail stressant ou un mode de vie sous tension permanente. La détection de ces gestes, parfois banals, est pourtant cruciale pour une compréhension complète du trouble.

Dysfonctionnements de la régulation motrice centrale

Le bruxisme n’est pas uniquement un acte musculaire périphérique ; il reflète un déséquilibre dans le contrôle central des mouvements. Plusieurs études en neurophysiologie ont mis en évidence une hyperactivation des structures cérébrales impliquées dans la régulation motrice, notamment les noyaux basaux et le cortex préfrontal.
Cette activation excessive pourrait résulter d’un déficit d’inhibition motrice, expliquant pourquoi les mouvements mandibulaires surviennent de façon répétée sans commande volontaire. Cette hypothèse neurobiologique est corroborée par des recherches ayant observé, chez certains bruxomanes, des altérations subtiles du fonctionnement dopaminergique, suggérant un lien possible avec d’autres troubles moteurs comme les dystonies ou les tics.

L’influence hormonale sur le bruxisme

Des variations hormonales, notamment celles du cortisol, ont été évoquées comme des éléments pouvant moduler l’intensité du bruxisme. Le cortisol, hormone du stress par excellence, connaît une élévation physiologique en cas d’anxiété chronique ou de perturbation du rythme circadien. Cette hypercortisolémie chronique est susceptible de favoriser une hyperexcitabilité neuromusculaire.
Chez certaines femmes, des épisodes de bruxisme peuvent également être rapportés en lien avec le cycle menstruel, la grossesse ou la ménopause, périodes caractérisées par des fluctuations hormonales importantes. Bien que ces données soient encore exploratoires, elles ouvrent des perspectives intéressantes pour la compréhension endocrinienne du bruxisme.

Pathologies associées au bruxisme

Le bruxisme s’inscrit parfois dans un tableau clinique plus large, en association avec d’autres pathologies somatiques ou psychiatriques. Les troubles de l’articulation temporo-mandibulaire (ATM), les migraines, les cervicalgies, ou encore certaines douleurs faciales idiopathiques, peuvent en être les conséquences ou les facteurs aggravants.
Du point de vue psychiatrique, le bruxisme est parfois observé chez les patients présentant des troubles obsessionnels compulsifs (TOC), des troubles du comportement alimentaire, ou encore des troubles de type autistique. Dans ces cas, le bruxisme n’est pas un symptôme isolé mais une composante d’un profil psychoneurobiologique plus complexe, nécessitant une prise en charge adaptée.

Environnement sonore et sensoriel et bruxisme

Certains patients rapportent une exacerbation de leur bruxisme en réponse à des stimuli sensoriels précis, tels que des bruits répétitifs, des lumières vives ou des tensions auditives (environnement bruyant, bureau open space, etc.). Cette hypersensibilité sensorielle pourrait être reliée à une réactivité accrue du système nerveux autonome.
Chez les enfants neuroatypiques ou hypersensibles, ces déclencheurs sont parfois à l’origine d’une majoration du bruxisme, notamment durant les périodes de surcharge sensorielle. Dans ces cas spécifiques, la désensibilisation progressive ou la modification de l’environnement peut participer à la réduction des épisodes bruxomanes.

La posture corporelle et bruxisme

Bien qu’en agissant comme mécanisme indirect, la posture générale du corps — notamment celle du rachis cervical — peut influencer la dynamique mandibulaire. Une mauvaise posture prolongée, en particulier en position assise, peut générer une tension musculaire dans la région cervico-faciale. Cette hypertonie posturale peut être transmise aux muscles masticateurs, contribuant à l’apparition ou à la pérennisation du bruxisme.
Des études en kinésithérapie et en ostéopathie ont montré que la rééducation posturale, lorsqu’elle est bien ciblée, permettait parfois de réduire significativement la fréquence des épisodes bruxomanes, en particulier chez les patients souffrant de douleurs myofasciales associées.

Photo docteur Valeria Romano à Genève

Article rédigé par le Dr Romano Valeria

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